Histoire de la Lozère

La Lozère, avant 1789 le Gévaudan, a connu tous les soubresauts de l'Histoire de France. Son passé s'inscrit dans sa géologie, ses paysages et les vestiges multiples qui jalonnent son territoire. Son histoire, longue de plusieurs millénaires, est évoquée ici à travers les grandes étapes qui la jalonnent.

Pays et paysages

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Les Cévennes, au coeur du Parc national.

La Lozère, riche de son histoire, l’est également de ses paysages, modifiés au fil du temps par les déboisements et les reboisements successifs.

Leur diversité constitue de véritables pays dont l'existence est liée à quatre roches principales, le basalte, le granite, le schiste et le calcaire : elles correspondent à quatre zones géographiques, l’Aubrac, la Margeride, les Cévennes et les Grands Causses.

La préhistoire

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Un menhir aux Bondons.

Les premiers peuplements attestés datent du paléolithique moyen (- 250 000 à - 35 000 ans). Les plus anciens témoignages de la présence de l’homme, contemporain de celui de Tautavel (Pyrénées-Orientales), ont été trouvés dans les grottes et les avens du causse Méjean et du causse de Sauveterre.

Au néolithique, les cavernes sont délaissées. Les premiers villages sont édifiés sur les plateaux, ceints de remparts rudimentaires ; plus de 600 mégalithes, menhirs (par exemple aux Bondons, près du mont Lozère) et dolmens, témoignent de cette occupation.

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Le dolmen de l'Aumède, près de Chanac.

L'époque gallo-romaine

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Gourde de Banassac en céramique sigillée (début IIe siècle).

La région est occupée par le peuple celte des Gabales, mentionné par Jules César dans La Guerre des Gaules. Les limites de la cité gallo-romaine, le Pagus Gabalitanus, sont approximativement celles du Gévaudan, qui lui succède au Moyen Âge et à l'époque moderne, puis celles du département de la Lozère.

Trois sites rassemblent des vestiges de cette époque :

  • Javols (Anderitum), alors capitale du pagus, dont les fouilles archéologiques commencées au XIXe siècle et poursuivies depuis ont permis de mettre au jour maisons, rues, monuments, nécropoles. Le site et la salle d'exposition accueillent aujourd'hui nombre de visiteurs. Accéder au site de Javols.
  • Lanuéjols, dont le mausolée, dédié à deux enfants morts en bas âge, daté de l'Antiquité tardive (IIIe-IVe siècle), est un modèle d'architecture funéraire.
  • Banassac, qui au Ier siècle produit des céramiques sigillées en grande quantité et les exporte dans tout l'Empire romain. À l'époque mérovingienne, le bourg se tourne vers la production de monnaies, avec la présence d'un atelier important (VIe-VIIe siècle).

Les débuts du Moyen Âge

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Eglise de Prévenchères

Ils sont marqués par les premiers pas de la christianisation, avec le martyre de saint Privat, premier évêque du Gévaudan, et l'importance des fondations monastiques, dont Saint-Martin de La Canourgue et le prieuré de Sainte-Enimie.

L'évêque fixe au Xe siècle sa résidence à Mende, devenu un lieu de pèlerinage très fréquenté en l'honneur de saint Privat.

L'administration carolingienne structure le territoire et place un comte à la tête de chaque pays (pagus). Les nombreux partages de l'empire de Charlemagne et les invasions du IXe siècle contribuent à l'émergence de pouvoirs locaux : évêques, seigneurs laïcs.

Dépendante du comté de Toulouse, la vicomté de Gévaudan est rattachée successivement au comté de Barcelone, au royaume d'Aragon puis au royaume de France en 1258.

Au XIIe siècle, l'évêque de Mende Aldebert III du Tournel pacifie son diocèse et obtient des pouvoirs sur le Gévaudan en échange de son allégeance au roi de France Louis VII (acte de 1161 connu sous le nom de Bulle d'or).

À partir du XIe siècle, les premières grandes forteresses médiévales et les premières églises romanes sont édifées.

Le siège de la puissance seigneuriale est symbolisée par l'apparition du Castrum, ensemble fortifié autour duquel les paysans se rassemblent en quête de protection. Ce mouvement suscite la création de villages, comme ceux de La Garde-Guérin, de Calberte, du Tournel, du Villard.

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Bulle épiscopale en plomb représentant un évêque mitré, la crosse tournée à droite, en main gauche et bénissant de la droite.

L'évêque et les barons

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La roue symbolise les 8 baronnies du Gévaudan, égales en droit.

Les vassaux du vicomte du Gévaudan, à la tête de huit baronnies (Apcher, Canilhac, Cénaret, Florac, Mercoeur, Peyre, Randon et Tournel), sont peu à peu soumis à l'influence de l'évêque. Après la Croisade des Albigeois et l'implantation du roi de France en Gévaudan, les relations difficiles entre les représentants du roi et les évêques de Mende aboutissent à un conflit.

Un acte de paréage, conclu en 1307, délimite le domaine du roi et celui de l'évêque, puis la terre commune (possession des barons). Elle érige le Gévaudan en comté dont le titre est porté par l'évêque de Mende. Cette organisation du Gévaudan perdure jusqu'en 1789.

 

La fin du Moyen Âge

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Battant de la cloche "la non pareille" détruite sur l'ordre du chef protestant Mathieu Merle en 1581.

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Mort de Bertrand du Guesclin devant Châteauneuf-de-Randon en 1380.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Elle est marquée par le rôle de Guillaume de Grimoard, né à Grizac, près du Pont-de-Montvert, devenu pape sous le nom d'Urbain V en 1362, pacificateur de l'Europe du XIVe siècle, réformateur de l'Église et bienfaiteur en Gévaudan.

Mende lui doit sa cathédrale gothique. L’édifice, longtemps symbole de la puissance du diocèse de Mende, en partie détruit pendant les guerres de Religion, a fait l’objet de nombreuses transformations.

Deux fléaux dominent le XIVe siècle : la grande peste de 1348 et la guerre de Cent Ans, dont l’épisode le plus remarquable pour le Gévaudan est le siège de la forteresse de Châteauneuf-de-Randon par le connétable Bertrand du Guesclin (1380).

Les luttes religieuses

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Manifeste des habitants des Cévennes sur leur prise d'armes, 1703.

Le XVIe siècle voit l’apparition puis l’expansion de la religion protestante. Les villes sont les premières touchées. Progressivement, grâce aux échanges commerciaux et aux prédications, les idées nouvelles remontent les vallées : tel est le cas des Cévennes et du Haut-Gévaudan.

Le protestantisme, qui rassemble toutes les catégories sociales, contribue largement à la construction de l’identité cévenole.

Entre 1562 (début des guerres de Religion) et 1598 (signature de l’édit de Nantes), les luttes religieuses génèrent destructions et exécutions. En 1579, Mende est prise par les protestants. En 1586, les catholiques s'emparent de Marvejols, bastion protestant.

La première moitié du XVIIe siècle est globalement calme, grâce à une politique de tolérance. Mais Louis XIV, souhaitant rétablir l'unité de l'Église, interdit le culte protestant par l'édit de Fontainebleau (1685). Beaucoup de temples sont alors détruits en Lozère. Quelques-uns ont été restaurés au cours de ces dernières décennies, comme ceux du Collet-de-Dèze et de Vialas.

La guerre des Camisards (1702-1705), déclenchée par l’assassinat de l’abbé du Chayla par les protestants, entraîne le brûlement des Cévennes par l'armée royale.

Fidèles à leur culte, les réformés se regroupent dans les assemblées du Désert, tandis que les persécutions se poursuivent tout au long du XVIIIe siècle, jusqu’à l’édit de tolérance de 1787, qui marque la reconnaissance civile des protestants français.

La bête du Gévaudan

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De 1764 à 1767, la Lozère connaît le sanglant épisode de la Bête du Gévaudan, qui se solde par la mort de plus d’une centaine d’enfants et de jeunes gens.

Il a fortement contribué à la célébrité du Gévaudan dans l’ensemble du royaume, forgeant une légende noire autour de ce territoire et des événements qui l’endeuillaient. Aujourd’hui encore, une abondante littérature est consacrée à ces événements mais de nombreuses interrogations demeurent.

Une architecture vernaculaire

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Le château de La Caze dans les gorges du Tarn.

Aux châteaux-forts, édifices à la fois militaires, économiques et politiques, symboles des temps féodaux (Le Tournel), succèdent des constructions où l'appareil défensif est plus symbolique (La Caze dans les gorges du Tarn, Condres, au nord du département).

Les guerres de Religion ralentissent cette évolution vers le château de résidence (Castanet, près de Villefort). Elle s'accélère au XVIIe siècle (La Baume, dans la terre de Peyre, Ressouches dans la vallée du Lot).

La Révolution de 1789

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Marc Antoine Charrier (1755-1793)

Le 5 février 1790, le Gévaudan, échappant de justesse à la perte de son identité, héritée de l'acte de paréage de 1307, devient le département de la Lozère, du nom de son massif le plus élevé. Ses limites sont cependant légèrement modifiées par rapport au diocèse de l'Ancien Régime.

La Constitution civile du clergé (1790), très mal acceptée dans ce pays profondément attaché à la religion catholique, provoque les offensives de la Contre-Révolution, menée par Marc-Antoine Charrier. Dans les Cévennes, les idées révolutionnaires ont été bien accueillies. Ce conflit entre l’Église catholique et l’État dure une dizaine d’années, jusqu’au Concordat de 1801.

Le XIXe siècle

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Mende, place du foirail, croix de la mission (1842).

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Affiche présentant les manifestations dans le cadre du centenaire de la mort de Théophile Roussel.

Le début du XIXe siècle est marqué par un renouveau religieux, dont l’Église catholique bénéficie notamment, avec la multiplication des vocations et des missions. À l'exception des Cévennes, fidèles à Napoléon, la Lozère soutient le retour de la monarchie.

Trois hommes politiques d’envergure ont des responsabilités au plan national :

  • Sous le Consulat, le chimiste Jean-Antoine Chaptal, né à Nojaret, est ministre de l’Intérieur de 1800 à 1804.

 

  • Lors de la IIe République, en 1848, Odilon Barrot, né à Villefort, partisan de la monarchie parlementaire, est élu député. Cette même année, il devient président du Conseil et ministre de la Justice.

 

  • Sous le Second Empire puis la IIIe République, Théophile Roussel, républicain, grande figure parlementaire du département de la Lozère, est à l'origine de nombreuses lois sur la protection sociale. Il favorise la création des premières lignes de chemin de fer. Villefort est la première cité desservie par le rail en 1867.

Économie traditionnelle et développement touristique

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Affiche présentant la filature des Calquières à Langogne.

L’économie du département est de type agro-pastorale mais une tradition textile est solidement établie depuis le Moyen Âge.

La cadisserie (travail de la laine) et, en Cévennes, la sériciculture (production de la soie), connaissent leur apogée au XIXe siècle. La filature des Calquières, à Langogne, témoigne de l’importance de cette activité aujourd’hui disparue.

La faible teneur des minerais n'a pas permis le maintien des exploitations minières.

Dans les années 1880, la naissance du tourisme profite des réseaux ferrés et routiers et doit beaucoup à Édouard-Alfred Martel, qui découvre l'aven Armand. Il ouvre de nouvelles perspectives pour le développement des espaces naturels.

Pionnier de la randonnée pédestre, l'écrivain Robert Louis Stevenson quitte en 1878 Le Monastier-sur-Gazeille, en Haute-Loire, pour rallier Saint-Jean-du-Gard, après avoir traversé les Cévennes et parcouru plus de 200 km.

www.chemin-stevenson.org

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Louis Armand dans la grotte qui porte son nom découverte en 1897.

Tensions religieuses et politiques

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Affiche de propagande (1919).

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Carte de la Lozère en 1942.

La fin du siècle est marquée par l’accroissement des tensions entre l’État républicain, qui se veut de plus en plus laïc, et les Églises.

En 1905, à la suite du vote de la loi de séparation des Églises et de l’État, l’inventaire des biens des établissements ecclésiastiques est à l’origine de violents affrontements dans de nombreux villages, en particulier dans le Nord du département, majoritairement catholique.

La Lozère paie un lourd tribut à la Grande Guerre de 1914-1918. Les pertes (22 % des mobilisés lozériens, contre 16 % au niveau national), associées au début de l’exode rural et à la crise des activités industrielles, engendrent un déficit démographique sans précédent.

En un siècle, le département perd la moitié de sa population (144 000 habitants en 1881, 73 000 en 1990).

Au début de la seconde guerre mondiale, une majorité de la population soutient le maréchal Pétain, tandis qu'un noyau de résistance grandit autour du maire de Mende, Henri Bourrillon.

Dès 1943, les maquisards deviennent actifs dans les monts de la Margeride, l’Aubrac et les Cévennes. La Lozère est libérée en août 1944 tandis qu'Henri Bourrillon meurt en déportation.

www.camp-rieucros.com

La Lozère relève le défi de la modernité

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Le Parc national des Cévennes organise chaque année un festival nature.

Aujourd’hui, on assiste à une cohabitation apaisée de la Lozère catholique conservatrice et de la Lozère protestante progressiste, présente surtout dans les Cévennes.

Après plusieurs décennies d’exode rural, la croissance démographique se poursuit depuis 1999 (77 000 habitants en 2012).

Le développement des communications (autoroute A 75, RN 88), les nouvelles technologies, l'aménagement du territoire, contribuent à une nouvelle dynamique lozérienne, tandis que le renouveau de la langue occitane forge l'identité du département.

À ces facteurs de développement, le département ajoute le tourisme vert, invitant les citadins à séjourner dans les gîtes ruraux, à fréquenter les sites naturels, dont le Parc national des Cévennes créé en 1970.

www.cevennes-parcnational.fr

Depuis le 28 juin 2011, l'UNESCO a inscrit les Causses et les Cévennes, paysage culturel de l'agro-pastoralisme méditerranéen, sur la liste du patrimoine mondial.

whc.unesco.org

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Affiche annonçant un congrès occitan.